Rituel, rythme et contre-rythme : le cas de deux carnavals alpins

La terre danse la danse du Macabré, il me semble parfois que le Danube est traversé par des bateaux pleins de fous se dirigeant vers un endroit sombre.

Umberto Eco, Le nom de la rose

Pour Ă©tudier un seul fait anthropologique, disons une fĂȘte de carnaval, il existe, on le sait, de nombreuses approches possibles, qui diffĂšrent selon la spĂ©cialisation particuliĂšre de l'observateur : l'historien aura tendance Ă  fonder ses recherches sur la possibilitĂ© de rĂ©cupĂ©rer des documents d'archives. , l'ethnologue penchera vers la comparaison avec des traditions similaires appartenant Ă  d'autres cultures, le linguiste se concentrera sur l'utilisation de codes dialectaux, vernaculaires ou de communication particuliers dans le contexte de l'Ă©vĂ©nement lui-mĂȘme, etc. Il s’agit bien entendu d’approches tout Ă  fait lĂ©gitimes qui, en s’intĂ©grant les unes aux autres, peuvent contribuer de maniĂšre substantielle Ă  accroĂźtre nos connaissances.

Cependant, nous avons l'impression que tant au niveau acadĂ©mique que dans les recherches menĂ©es par cette catĂ©gorie large et difficile Ă  dĂ©finir que nous dĂ©signons par le terme « savants locaux », il y a une tendance Ă  privilĂ©gier certaines voies cognitives par rapport Ă  d'autres. Parmi les perspectives les plus nĂ©gligĂ©es, lorsqu’on parle de manifestations de nature rituelle, il y a celle qui met au premier plan l’expĂ©rience du participant individuel, la description directe de l’expĂ©rience tant au niveau psychologique que physique ; certainement en raison de la difficultĂ© objective de mener des recherches en ce sens, mais aussi peut-ĂȘtre d'une certaine influence que le monde acadĂ©mique anglo-saxon, notoirement enclin Ă  privilĂ©gier les donnĂ©es objectives et quantifiables des sciences dites « dures », exercices dans le domaine des Ă©tudes humanistes. Ce qui risque malheureusement d’exclure des vues d’un grand intĂ©rĂȘt, capables d’éclairer davantage les rituels, les coutumes, les comportements et les appareils formels de notre tradition culturelle.

Piercarlo Grimaldi, suivant la leçon de Leroi-Gourhan, avait dĂ©jĂ  soulignĂ© combien la structure mĂȘme du rite carnavalesque met en Ɠuvre une sĂ©rie de comportements qui, en inversant les rythmes habituels de la vie quotidienne et en agissant au niveau perceptif, psychophysiologique et neurologique, peuvent induire un Ă©tat d'altĂ©ration de la conscience du participant ; et c'est prĂ©cisĂ©ment Ă  travers ce type de partage expĂ©rientiel que les cĂ©lĂ©brations, qui ont pour fonction de marquer le passage rythmĂ© du temps, ils se situent hors du temps Ă  un niveau qui est perçu et vĂ©cu, avant mĂȘme d'ĂȘtre compris intellectuellement, comme supra-temporel.. Pour mieux clarifier notre propos, nous prendrons comme exemple pratique deux des carnavals piĂ©montais les plus populaires des Alpes, le Bahio de Sampeyre (CN) et le Carlavee de Varallo Sesia (VC), en se concentrant en particulier sur le jour de On se voit lundi de PĂąques qui constitue le moment d’ouverture. 


La Bahio (abbaye, milice, association masculine) de Sampeyre, dans le Val Varaita, est une tradition mise en Ɠuvre tous les cinq ans qui partirait d'un Ă©vĂ©nement historique survenu vers l'an mille : l'expulsion par les milices locales des pirates sarrasins venus de Ligurie et de la CĂŽte d'Azur pour piller les hautes vallĂ©es piĂ©montaises. En rĂ©alitĂ©, l'Ă©vĂ©nement prĂ©sente trĂšs peu de caractĂ©ristiques qui rappellent une vĂ©ritable reconstitution historique : les costumes portĂ©s par plus de trois cents personnages n'ont rien de mĂ©diĂ©val et vont des jupes-culottes jusqu'aux genoux et felouques du XVIIIe siĂšcle aux vestes machaon et aux plus cylindres typiques du XIXe siĂšcle, en cette atmosphĂšre d'anachronisme (mais il serait peut-ĂȘtre plus juste de parler d'a-chronisme, ou de « temps hors du temps ») qui est l'un des aspects les plus incisifs du carnaval.

Une caractĂ©ristique remarquable des costumes sont les dĂ©corations florales rĂ©alisĂ©es avec de prĂ©cieux rubans de soie appelĂ©s classeur, que chaque famille gardait autrefois dans son coffre, Ă  plat pour Ă©viter qu'il ne se brise, et que les femmes tissaient selon des codes prĂ©cis Ă  l'occasion d'Ă©vĂ©nements particuliers comme les mariages ou les baptĂȘmes. L'utilisation de ce type de dĂ©coration met en Ă©vidence Ă  quel point l'Ă©vĂ©nement se greffe, sous prĂ©texte de souvenir d'un Ă©pisode de guerre, sur une tradition probablement beaucoup plus ancienne liĂ©e aux rites de fertilitĂ© du printemps. 

Les personnages de BahiĂČ

Les habitants de la rĂ©gion de Sampeyre et des hameaux de Calchesio, Rore et Villar participent au rite, chacun avec sa propre milice carnavalesque ; le hameau de Sant'Anna marche avec le groupe Calchesio, tandis que les habitants de Becetto (dont la milice a apparemment Ă©tĂ© supprimĂ©e en raison de graves problĂšmes d'ordre public) rejoignent le groupe concentrique. Le complexe rituel ouvre officiellement le 6 janvier lorsque les jeunes, Ă  la sortie du messe solennelle de l'Epiphanie, entrez sur la place et, en criant fort et accompagnĂ© de tambours, accordĂ©ons, cloches et instruments de musique improvisĂ©s, demandez l'Ă©tablissement du Bahio. Au milieu de ce « vacarme rituel », le groupe passe sous les maisons des AbĂ  c'est-Ă -dire les chefs des milices, qui ont la charge, y compris Ă©conomique, d'organiser les dĂ©filĂ©s (en rĂ©alitĂ© aujourd'hui ce sont les banques, les caisses d'Ă©pargne et les autoritĂ©s locales qui fournissent l'argent pour cet Ă©vĂ©nement, qui a des rĂ©percussions importantes sur le tourisme Ă©conomie de la rĂ©gion). Lors de l'affichage des banderoles de la milice devant les fenĂȘtres du AbĂ  S'ensuit une sĂ©rie de rĂ©unions formelles entre les hiĂ©rarques, qui rĂ©partissent les rĂŽles et s'assurent de la disponibilitĂ© effective des ressources matĂ©rielles et humaines pour monter les processions, tandis que les femmes ont pour tĂąche de prĂ©parer les costumes. Il s’agit, rappelons-le, d’un des trĂšs rares moments de participation de la gente fĂ©minine : pratiquement tous les rĂŽles au sein du BahiĂČ, y compris les rĂŽles fĂ©minins, sont en fait jouĂ©s par des acteurs masculins.

Les dĂ©filĂ©s proprement dits commencent les deux dimanches prĂ©cĂ©dant la semaine du carnaval., avec les acteurs des diffĂ©rentes milices dĂ©filant au roulement des tambours et se rĂ©unissant aux frontiĂšres de leurs zones de rĂ©sidence respectives, Ă©changeant le salut militaire en croisant leurs Ă©pĂ©es. Les participants au dĂ©filĂ© se dĂ©roulent dans l'ordre et Ă  un rythme militaire rigide, Ă  l'exception duArlequin: il s'agit d'un personnage qui peut perturber le cortĂšge et interagir avec les spectateurs en agitant un bĂąton auquel est suspendu une souris ou un Ă©cureuil en peluche, formellement pour Ă©viter qu'ils ne gĂȘnent les acteurs mais en rĂ©alitĂ© pour donner vie Ă  de petits sketches comiques avec le participation des passants, un peu Ă  l'image de la Issohadores lors du carnaval de Mamoiada (NU), en Sardaigne. Cet Arlequin, en tout cas, composĂ© de fourrure animale et du chapeau auquel pendent des coquilles d'escargots, rappelle davantage la figure de l'Homme Sauvage de nombreuses traditions et lĂ©gendes montagnardes.

Un Arlequin

Les dĂ©filĂ©s des milices s'arrĂȘtent des dizaines de fois dans la journĂ©e aux points de ravitaillement installĂ©s par les tavernes ou par les propriĂ©taires de maisons privĂ©es donnant sur la rue. À chaque arrĂȘt se trouvent des barricades faites de troncs d'arbres, reprĂ©sentant les barriĂšres que les Sarrasins en fuite Ă©rigeaient pour ralentir la poursuite des vainqueurs ; ils sont abattus Ă  coups de hache par les hommes barbus connaisseur, correspondant aux sapeurs de l'ancienne armĂ©e napolĂ©onienne et Ă©galement prĂ©sent dans un autre carnaval cĂ©lĂšbre du nord de l'Italie, celui de Schignano (CO). Les Ă©clats des troncs de bois sont utilisĂ©s par les sapeurs comme objet d'Ă©change dans les tavernes afin de boire gratuitement ; il peut aussi arriver que quelqu'un tente de voler un classeur ou un autre Ă©lĂ©ment du costume des acteurs, ou encore pour kidnapper physiquement le personnage duespouzo (mariĂ©e) toujours Ă©videmment jouĂ©e par un homme. Celui qui est victime d'un vol doit chasser et capturer le voleur/kidnappeur avant qu'il ne parvienne Ă  se rĂ©fugier dans une taverne : si cela se produit, le voleur paiera pour la boisson, sinon c'est le contraire qui se produira. 

Faire tomber les barriĂšres

Le point culminant du rituel est le jeudi gras: le matin, les milices fractionnaires descendent en concentricitĂ© pour les danses sur la place municipale, qui se poursuivent jusqu'au milieu de l'aprĂšs-midi. Ensuite, chaque cortĂšge retourne dans sa rĂ©gion d'origine pour le procĂšs des trĂ©soriers, coupable d'avoir tentĂ© de s'enfuir avec l'argent liquide ; figure typique du bouc Ă©missaire du carnaval qui prend sur lui tous les maux de la communautĂ©, le tezourie, pĂąle de peur (son visage est volontairement enduit de farine) apparaĂźt devant le juge vĂȘtus de noir, ils mettent en scĂšne ensemble un procĂšs farfelu qui peut ĂȘtre rĂ©citĂ© en italien et en occitan. Le procĂšs se termine par la condamnation Ă  mort de l'accusĂ©, mais la sentence n'est pas toujours appliquĂ©e : dans Sampeyre et Rore concentriques deux personnages vĂȘtus de blanc peuvent intervenir, le fie de mariĂ© (filles Ă  marier, jouĂ©es cette fois par de vraies femmes) qui implorent le pardon du condamnĂ©, tandis qu'Ă  Calchesio et Villar le trĂ©sorier est fusillĂ© par grenades (grenadiers). Dans le cas de Villar, il arrivait autrefois que le trĂ©sorier soit « ressuscitĂ© » grĂące Ă  une gĂ©nĂ©reuse portion de vin dans une taverne voisine, comme cela se produit dans d'autres carnavals piĂ©montais : nous citons comme exemple la mort et la rĂ©surrection duArlequin qui conclut le Bal du Sabre de Bagnasco, Ă©galement dans la rĂ©gion de Cuneo. 

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Le juge lit la sentence du trésorier

Le processus est terminĂ© la fĂȘte entre dans sa phase la plus animĂ©e avec une longue veillĂ©e nocturne qui, entre danse et boisson, se poursuit souvent jusqu'au lendemain matin. Lors de la veillĂ©e, aux coups de minuit, les noms des dirigeants qui, cinq ans plus tard, auront pour mission d'organiser une nouvelle Bahio.


Le carnaval de Varallo, capitale du Val Sesia, s'ouvre officiellement le soir du 5 janvier avec le Super bal de la Veggia (Grande Danse de la Vieille Femme) ; Y participent des groupes masquĂ©s venus de toute la vallĂ©e, pour qui l'Ă©vĂ©nement reprĂ©sente la premiĂšre occasion officielle de l'annĂ©e oĂč ils peuvent revĂȘtir les costumes qu'ils ont abandonnĂ©s Ă  la fin du carnaval de l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Dans ce cas Ă©galement les costumes, colorĂ©s et parfois agrĂ©mentĂ©s de motifs floraux, rappellent le printemps ; par-dessus le costume, quand on est Ă  l'extĂ©rieur, on porte gĂ©nĂ©ralement un lourd manteau uni, gĂ©nĂ©ralement de couleur noire ou foncĂ©e, sur lequel le propriĂ©taire Ă©pingle les petits bibelots qui sont distribuĂ©s Ă  chaque veillĂ©e ou carnaval de la vallĂ©e., de sorte qu'en un coup d'Ɠil il est possible de comprendre depuis combien de temps l'interprĂšte du masque fait partie de l'environnement plutĂŽt exclusif du carnaval.

Contrairement Ă  ce qui se passe Ă  Sampeyre, hommes et femmes participent indiffĂ©remment aux carnavals valsĂ©siens, avec une distinction rigide des rĂŽles entre les deux sexes (roi, reine, soldat de garde, demoiselle, concubine, etc.) qui se reflĂšte Ă©galement dans le style des costumes. costumes. Une exception est un groupe de personnages qui apparaissent uniquement et exclusivement Ă  Varallo pendant les deux premiers jours du Carnaval, ou la On se voit lundi de PĂąques et sa famille composĂ©e de son mari VĂ©gĂ©tarien Bacuc (Vieux Bacucco) et trĂšs prospĂšre balia qui a pour tĂąche de s'occuper Marcantonio CarlavĂ©e, roi du carnaval qui naĂźt reprĂ©sentĂ© par une poupĂ©e. Les deux rĂŽles fĂ©minins sont jouĂ©s par des hommes, mais l'identitĂ© de l'acteur qui joue le rĂŽle Voir (qui doit toujours ĂȘtre de Varallo) est gardĂ© strictement secret et au moment de la prĂ©sentation officielle des masques, vers minuit entre le 5 et le 6 janvier, elle apparaĂźt le visage couvert d'un chĂąle pour ne pas ĂȘtre reconnue.

Le Veggiu Bacuc, l'infirmiĂšre et la Veggia Pasquetta avec le petit Marcantonio

Le rite Varallo du jour de l'Epiphanie (unique en Valsesia, mais similaire aux traditions prĂ©sentes ailleurs dans le nord de l'Italie, par exemple Ă  Colloro et Premosello Chiovenda, toutes deux dans la province de Verbania) s'ouvre le matin avec l'accueil des groupes folkloriques invitĂ©s. , gĂ©nĂ©ralement les agitateurs de drapeaux du Frontal d'Asti, qui se produisent sur la place devant l'Ă©glise paroissiale. En dĂ©but d'aprĂšs-midi, les groupes masquĂ©s de la vallĂ©e se rassemblent aux limites occidentales du Varallo Vecchio, la commune situĂ©e Ă  l'ouest du ruisseau Mastallone ; le seul groupe Ă  ne jamais ĂȘtre prĂ©sent Ă  cette premiĂšre phase est celui de Varallo Nuovo, Ă  l'est du Mastallone. À l'arrivĂ©e de la bande musicale, commence la procession, Ă  laquelle participent des personnes masquĂ©es et non et accompagnĂ©e d'un trĂšs modeste char allĂ©gorique Ă  partir duquel les garçons du ComitĂ© du Carnaval de Varallo Vecchio distribuent le Testament de la Veggia, un poĂšme satirique, en Ă©change d'un don, en dialecte valsĂ©sien. Le cortĂšge s'arrĂȘte Ă  plusieurs endroits pour permettre les performances des groupes invitĂ©s. 

La procession dans les rues de Varallo Vecchio

Le ton de la manifestation change lorsque le cortĂšge traverse le pont sur le Mastallone et entre sur le territoire de Varallo Nuovo : les gardes de Varallo Nuovo interviennent et ont pour tĂąche de capturer Veggia et de la traduire en justice sous l'accusation d'avoir Ă©tĂ© infidĂšle au VĂ©gĂ©tarien Bacuc et avoir conçu Marcantonio illĂ©gitimement. La Voir pour sa part il en met en scĂšne une Ă©vasion audacieuse au cours de laquelle elle peut pĂ©nĂ©trer dans des maisons privĂ©es, voler des scooters ou des vĂ©los, interagir avec des spectateurs appelant Ă  l'aide en poussant de grands cris et mĂȘme s'introduire par effraction dans le cimetiĂšre de l'Ă©glise paroissiale, tandis que les gardes essoufflĂ©s sont obligĂ©s de la poursuivre Ă  pied. La scĂšne spectaculaire et trĂšs mouvementĂ©e se termine en tout cas par la capture de Veggia, qui, enfin rĂ©vĂ©lĂ©e, est traĂźnĂ©e de force sur la place oĂč le chambellan de Varallo Nuovo lit la sentence la condamnant au bĂ»cher. A ses cĂŽtĂ©s, quelques personnages en costumes de bourreau, i FrĂšres de la Bonne Mort: dernier Ă©cho parodique d'une confrĂ©rie religieuse effectivement prĂ©sente Ă  Varallo au cours des siĂšcles passĂ©s, liĂ©e Ă  l'Ă©glise de Santa Marta, aujourd'hui disparue, qui, entre autres tĂąches, avait celle d'offrir une assistance spirituelle aux condamnĂ©s Ă  mort.

Lecture de la phrase

AprĂšs un arrĂȘt dans quelques bars et discothĂšques du centre pour attendre la tombĂ©e de la nuit, le cortĂšge revient sur ses pas vers le pont sur le Mastallone, tandis que les participants (masquĂ©s ou non) hurlent des cris de stentor tels que "Ă  mort !", "au bĂ»cher !", "brĂ»lez la Vieille !", "brĂ»lez, brĂ»lez !" et similaire ; en s'Ă©loignant de la place, a lieu l'adieu formel des groupes d'invitĂ©s, qui, par tradition, ne participent pas au moment final du rite. Avant d'arriver sur le pont, Veggia peut encore tenter de courtes Ă©vasions des gardes, souvent dans des tavernes oĂč elle et ses ravisseurs se voient offrir des boissons. Finalement, la victime sacrificielle (car c'est bien de cela qu'il s'agit) est emmenĂ©e dans le lit de la riviĂšre et brĂ»lĂ©e vive, Ă©videmment remplacĂ©e au dernier moment par une marionnette pleine de poudre et de pĂ©tards. Les spectateurs regardent la scĂšne Ă©vocatrice depuis les parapets du pont, tandis que le groupe musical joue des airs joyeux au rythme de plus en plus pressant. 

Les gardes célÚbrent l'incendie de la Veggia Pasquetta

L'une des techniques les plus connues pour induire des phĂ©nomĂšnes d'altĂ©ration (mais il vaudrait peut-ĂȘtre mieux parler d'« amplification ») de la conscience est celle de mettre en Ɠuvre une modification volontaire des rythmes de son corps, de son « temps » interne, par exemple en inversant la perception du cycle jour-nuit : dans les moments rituels que nous avons pris en considĂ©ration, l'homme s'approprie un temps qui n'appartient pas Ă  lui, celle d'une nuit d'hiver trĂšs rigide dans les montagnes peuplĂ©es d'esprits et de puissances obscures, et la transforme en un « jour » fictif alimentĂ© par le sacrifice d'une victime rituelle, oĂč de grands feux sont allumĂ©s et oĂč les gens dansent continuellement jusqu'aux premiĂšres lueurs du jour. aube. Il a Ă©galement Ă©tĂ© constatĂ© que le carnaval de Sampeyre suit un double calendrier ; la date de dĂ©part, l'Epiphanie, est rĂ©glĂ©e par le calendrier solaire, tandis que les dates mobiles des processions sont calculĂ©es sur la base du calendrier lunaire : le premier dĂ©filĂ© des milices a lieu l'avant-dernier dimanche avant le dĂ©but du CarĂȘme, avec la pleine Lune, tandis que les deux autres surviennent avec la Lune dĂ©croissante, accentuant la dynamique de exploration de l'obscuritĂ© de la nuit quand elle est la plus forte et du rythme oppositionnel entre la lumiĂšre et l'obscuritĂ©. 

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Toujours dans l'optique de modifier son rythme interne, il revient participation Ă  des cortĂšges et des dĂ©filĂ©s. Dans ce contexte particulier, l'alpiniste est obligĂ© d'arrĂȘter la longue foulĂ©e qui lui est typique et d'ajuster son allure Ă  un rythme plus court et plus cadencĂ©, rĂ©gulĂ© par le son des tambours et des instruments de musique qui accompagnent le dĂ©filĂ© et interrompu par de nombreux arrĂȘts : l'opĂ©ration demande un effort semi-conscient et accentue la sensation d'entrer dans un « monde » diffĂ©rent, inversĂ© par rapport Ă  celui de la vie quotidienne. 

Les musiciens qui accompagnent le défilé de l'abbaye

En parlant d'"inversions", nous ne pouvons manquer de mentionner l'une des plus typiques du carnaval, l'inversion entre l'homme et la femme. A Sampeyre et dans une moindre mesure Ă  Varallo, une fois par an, le mĂąle a la possibilitĂ© de porter des vĂȘtements de femme, auxquels il n'est visiblement pas habituĂ© et qui nĂ©cessitent une certaine habitude Ă  porter (il suffit de penser Ă  l'Ă©ventuel obstacle que peut reprĂ©senter une jupe pour celles qui ont toujours portĂ© un pantalon). Les tissus avec lesquels les vĂȘtements pour femmes sont fabriquĂ©s sont Ă©galement souvent qualitativement diffĂ©rents des vĂȘtements pour hommes habituels ; par exemple, la sensation d'un bonnet ornĂ© de dentelle sur la tĂȘte ou d'une chemise en soie sur la peau, pour ceux qui portent normalement les tissus les plus rugueux adaptĂ©s au travail en montagne, est de nature Ă  altĂ©rer la perception kinesthĂ©sique du corps. Ce contre-rythme ne concerne pas seulement les vĂȘtements mais dans certains cas aussi les objets rituels utilisĂ©s lors des Ă©preuves : les haches des sapeurs de Sampeyre, outil de travail que l'alpiniste connaĂźt certainement, ont le manche enveloppĂ© de dĂ©licats des rubans de soie, de sorte que les tenir reprĂ©sente une expĂ©rience totalement diffĂ©rente de la normale. 

Les sarazine (filles sarrasines) de Sampeyre, jouées par des enfants mùles, accompagnées du tambourin magiur (batteur majeur) qui marque le temps du défilé avec une perche enveloppée de soie

C'Ă©tait considĂ©rĂ© comme le temps Le carnavalesque prend souvent la dynamique d’un conflit entre forces opposĂ©es, qui se traduit naturellement aussi au niveau de l’action physique. L'ensemble du complexe rituel de Bahio de Sampeyre part d'un Ă©vĂ©nement de guerre : en mettant en scĂšne la dĂ©faite et l'expulsion des Sarrasins, les villageois ont la possibilitĂ© de se rendre physiquement sur le terrain et de faire la guerre aux forces dĂ©chaĂźnĂ©es des tĂ©nĂšbres et de la mort, ainsi exorcisĂ©es. À Varallo, le thĂšme du conflit s'est progressivement affaibli au fil du temps : les preuves historiques nous disent en effet que le rituel original impliquait l'allumage non pas d'un mais de deux feux de joie sur les deux rives du ruisseau Mastallone, un pour Varallo Vecchio et un pour Varallo Nuovo, dans une compĂ©tition qui dĂ©gĂ©nĂ©rait souvent en une vĂ©ritable bagarre dans laquelle des pierres et des coups. Cette rivalitĂ© se traduit Ă©galement par le contraste entre les animaux « totĂ©miques » auxquels s'identifient les habitants des deux quartiers : i dughi (hiboux) de Varallo Vecchio ei falcheit (faucons) de Varallo Nuovo, qui offre encore un exemple fascinant du contraste entre la nuit et le jour, la lumiĂšre et l'obscuritĂ© ainsi qu'une description didactique des caractĂšres et attributs typiques des deux quartiers : sagesse atavique, fidĂ©litĂ© aux traditions mais aussi entĂȘtement et peur des innovations pour Varallo Vecchio , dĂ©brouillardise, prĂ©voyance mais aussi irrĂ©vĂ©rence et manque de respect pour Varallo Nuovo. Aujourd'hui, les habitants de Varallo se limitent pour la plupart Ă  une participation Ă©motionnelle au conflit entre les deux quartiers historiques de la ville reprĂ©sentĂ© par la fuite et la capture de la Veggia (venant des frontiĂšres les plus Ă©loignĂ©es de Varallo Vecchio) par les gardes de Varallo Nuovo, ainsi que comme assister aux dĂ©monstrations d'adresse et d'agilitĂ© physique proposĂ©es par les porte-drapeaux d'Asti ou par d'autres groupes invitĂ©s. Il faut cependant ajouter que l'implication des participants dans les Ă©vĂ©nements s'accentue au fur et Ă  mesure du carnaval de Varallo : par exemple le soir du CarnevalĂ a n'tla strĂ a (Carnaval dans la rue, coĂŻncidant souvent mais pas toujours avec la fĂȘte patronale de San Gaudenzio) se termine par un manĂšge autour d'un feu allumĂ© sur la place, un manĂšge trĂšs Ă©nergique dans lequel l'essentiel de la fĂȘte consiste Ă  ĂȘtre violemment tirĂ© par les bras. A la fin de la danse du roi Marcantonio CarlavĂ©e (cette fois un adulte et jouĂ© par un vĂ©ritable acteur) nous invite Ă  nous souvenir de nos dĂ©funts et des personnes qui ont contribuĂ© Ă  maintenir la tradition carnavalesque Ă  travers les siĂšcles, et les personnes prĂ©sentes fondent en larmes cathartiques.

Le rond-point qui conclut le CarnevalĂ a n'tla strĂ a de Varallo

Si le carnaval implique un changement qualitatif dans la maniĂšre de vivre le temps, il en va de mĂȘme pour l’espace. En effet, d'un autre point de vue, on pourrait dire que le temps lui-mĂȘme prend le caractĂšre qualitatif d'un espace transfigurĂ© par le rituel, comme le dit le Chevalier du Graal Gurnemanz dans le cĂ©lĂšbre «Parsifal» de Wagner : « Du siehst mein Sohn, zum Raum wird hier die Zeit », « Tu vois, mon fils, ici le temps devient espace ». 

Le fait que la destruction ou le dĂ©passement d’une barriĂšre soit liĂ© aux concepts de renouveau et de fertilitĂ© fait tellement partie de notre culture que nous ne le remarquons presque plus : pensons simplement Ă  la cĂ©rĂ©monie d'inauguration d'une exposition ou d'un nouveau bĂątiment, ou au fait de forcer deux jeunes mariĂ©s Ă  couper un gros tronc d'arbre avec une scie Ă©moussĂ©e, comme c'est la tradition dans certains mariages piĂ©montais ; mais l'extraordinaire anciennetĂ© de ce concept est dĂ©montrĂ©e, dans des cultures trĂšs lointaines de nous, par l'existence de figures mythiques particuliĂšres liĂ©es Ă  l'hiver, comme le serpent Váč›tra de la tradition indo-bouddhiste qui est tuĂ© pour "libĂ©rer les eaux" auxquelles il bloque provoquant la sĂ©cheresse. Dans les villages de montagne, les fortes chutes de neige du passĂ© empĂȘchaient souvent la libre circulation et limitaient les espaces d'interaction sociale. Il n'est donc pas surprenant de voir comment dans le rituel du carnaval de Sampeyre, liĂ© au thĂšme du retour du printemps, il y a de plus en plus, le dĂ©cloisonnement s'est rĂ©pĂ©tĂ© Ă  plusieurs reprises, non sans une implication physique violente et une dĂ©monstration de puissance virile de la part des acteurs.. MĂȘme l’échange de salutations militaires entre les hiĂ©rarques des diffĂ©rentes milices, qui a lieu Ă  la frontiĂšre entre la zone concentrique et les hameaux, a un grand poids de ce point de vue : les participants marquent physiquement les frontiĂšres de leurs propres territoires, qui ne coĂŻncident pas toujours avec les frontiĂšres administratives actuelles des zones spĂ©cifiques, participant au rĂ©cit mythique d'un dĂ©filĂ© militaire, et les limites gĂ©ographiques elles-mĂȘmes acquiĂšrent un poids mĂ©taphysique dans le processus par lequel les membres des communautĂ©s crĂ©ent (ou recrĂ©ent) mentalement l'espace dans lequel se dĂ©roulera leur vie quotidienne aprĂšs le carnaval. 

La milice de Villar en marche vers la frontiĂšre

La barriĂšre entre les deux quartiers de Varallo, comme nous l'avons dĂ©jĂ  vu, est le ruisseau Mastallone, qui est traversĂ© par le dĂ©filĂ© Veggia Pasquetta et marque le passage entre la premiĂšre et la deuxiĂšme phase du rite ; mais il joue Ă©galement le rĂŽle de centre du monde, de lieu d'origine de la communautĂ© Varallo, puisque la ville de Varallo s'est historiquement dĂ©veloppĂ©e Ă  partir d'ici, c'est-Ă -dire autour de l'ancien ferry, aujourd'hui remplacĂ© par un pont, qui reliait le deux rives du ruisseau. Ici est nĂ© Varallo et ici Varallo renaĂźt chaque annĂ©e avec l'incendie du On se voit lundi de PĂąques qui marque le dĂ©but du Carnaval ; ici d'ailleurs, le fils de la femme mourra toujours sur le bĂ»cher Voir Lundi de PĂąques, Roi Marcantonio CarlavĂše, lorsque le carnaval aura atteint sa conclusion naturelle, clĂŽturer le cycle de la mĂȘme maniĂšre. Ce retour aux origines s'effectue Ă  travers un itinĂ©raire Ă  la fois symbolique et physique que les participants suivent tout au long de la journĂ©e, et Ă©tait probablement autrefois Ă©galement indiquĂ© par des rĂ©fĂ©rences visuelles et des suggestions dont nous avons aujourd'hui du mal Ă  saisir immĂ©diatement le sens. Il semble difficile d'attribuer au hasard, par exemple, la prĂ©sence de une horloge Ă  l'effigie de Saturno directement sur l'un des anciens palais nobles qui surplombent ce lieu si plein de significations mythiques et symboliques : Saturno, roi de l'Ăąge d'or oĂč le temps n'existait pas encore, roi de l'Ăšre future oĂč le temps s'arrĂȘtera et oĂč le monde sera rĂ©absorbĂ© jusqu'au point trans-spatial et trans-temporel d'oĂč il est originaire. 

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Saturne veille sur le cours du ruisseau Mastallone

Lié à la perspective de retracer le cours ordinaire du temps dans l'espace, mais non de le surmonter dans une perspective eschatologique, il s'agit plutÎt d'un moment bien plus tardif que le carnaval de Varallo, la Giurnaa de la leugna (jour du bois) à la veille du mardi gras. Un autre cortÚge carnavalesque quitte la ville et se dirige vers le territoire du hameau de Crevola, autrefois situé au-delà de la frontiÚre avec la France ; ici le roi du carnaval de Crevolese, Carcarugu (nom onomatopée désignant le coq, l'un des symboles de la France) rend hommage aux habitants de Varallo sous forme de morceaux de bois de chauffage, qui serviront le lendemain à préparer la paniccia (minestrone végétale) distribuée gratuitement aux population. Le tribut aurait été imposé en échange de l'autorisation des habitants de Crevola, par la municipalité de Varallo, d'utiliser l'ancien pont à péage qui reliait la zone concentrique au hameau. Nous sommes essentiellement confrontés à un carnaval mendiant dans lequel interviennent des éléments liés à l'histoire et à la politique locales, éléments qui sont dramatisés et, pour ainsi dire, consacrés dans la mémoire collective à travers le rituel. Le défilé est d'ailleurs précédé par l'un des objets rituels les plus anciens du carnaval de Varallo, le Marcantoniu de Salaim (Marcantonio dei salami), effigie grotesque en bois ornée de salami datant de 1885. Quelqu'un voulait voir l'imitation blasphématoire d'un crucifix, presque comme si le défilé du Giurnaa de la leugna était initialement prévu comme parodie des rogations religieuses qui étaient faites le long des rives du Mastallone et de la riviÚre Sesia, qui sépare Varallo de Crevola, pour éviter les inondations et les sécheresses et pour obtenir une bonne récolte.

Le défilé Giurnàa d'la leugna entre sur le territoire de Crevola

Comme nous l'avons dĂ©jĂ  dit, il est particuliĂšrement difficile d'Ă©tudier ce que l'expĂ©rience du carnaval reprĂ©sente pour l'individu. L'inversion des perceptions et des rythmes physiologiques du corps, la danse tourbillonnante, la compĂ©tition physique, les circumambulations d'un espace sacralisĂ©, le remplacement de l'identitĂ© par l'usage de masques sont des outils notoirement utilisĂ©s dans les traditions culturelles du monde entier, capables d'induire des Ă©tats d'altĂ©ration de conscience plus ou moins profonds ; mais toute tentative de comprendre ce que cela pourrait signifier exactement pour la personne qui, Ă  ce moment particulier, expĂ©rimente cette condition doit faire face Ă  l'une des caractĂ©ristiques les plus rĂ©currentes de l'expĂ©rience elle-mĂȘme, Ă  savoir son ineffabilitĂ© partielle ou totale. Le chercheur qui pose la question fatidique « qu'est-ce que ça fait d'aller au carnaval ? se heurte souvent au refus ou Ă  la prĂ©tendue incapacitĂ© de dĂ©crire verbalement l’expĂ©rience. « Cela ne peut pas ĂȘtre expliquĂ© », « cela ne peut pas ĂȘtre dit », « c'est indescriptible », « il n'y a pas de mots » sont parmi les rĂ©ponses les plus courantes que vous pouvez recevoir ; ou, comme le dit une chanson populaire cĂ©lĂ©brant le carnaval de Varallo, « ne cherchez pas d'explications ».

NĂ©anmoins, au moins dans de vagues lueurs, il est peut-ĂȘtre possible de dire quelque chose. Les rites du Nouvel An que nous avons pris en considĂ©ration sont des objets sĂ©mantiques complexes et redondants qui matĂ©rialisent le rĂ©cit collectif du mythe, Ă  travers lequel les innombrables gĂ©nĂ©rations humaines se sont reprĂ©sentĂ©es par rapport Ă  l'univers qui les entourait ; Et participer, c'est s'ouvrir Ă  la possibilitĂ© d'expĂ©riences qui, mĂȘme si pour des raisons socioculturelles elles ne sont plus reconnues comme telles, ont dĂ©finitivement une valeur mystique. L'acteur carnavalesque ne porte pas le costume et le masque, il « devient » le costume et le masque : sa personnalitĂ© habituelle, liĂ©e au quotidien, passe au second plan, pour lui l'espace et le temps ordinaires sont suspendus et dans des moments particuliers de l'annĂ©e il a la possibilitĂ© de se dĂ©placer dans le mĂȘme monde des Dieux et des AncĂȘtres, des syzygies divines et des processions des esprits ruraux.

Le groupe masqué de Varallo Vecchio lors du Gran Bal d'la Veggia

Bien entendu, cette issue positive n'est pas toujours possible, car l'homme au masque court toujours sur le fil du rasoir : si sa personnalitĂ© voulait garder le contrĂŽle Ă  tout prix, le rituel deviendrait la rĂ©itĂ©ration ennuyeuse et insipide d'une coutume qui n'est pas toujours possible. s'il en comprend mieux le sens, s'il se retirait complĂštement, il tomberait dans l'inconscience des excĂšs orgiaques, dans les divagations animales de l'ivrogne. Ceux qui ont la chance de possĂ©der la constitution psychique particuliĂšre nĂ©cessaire pour maintenir un Ă©quilibre dynamique entre ces deux extrĂȘmes il parle plutĂŽt d'expĂ©riences trĂšs particuliĂšres, parfois vaguement dĂ©crites comme une "ivresse lucide", au cours de laquelle le monde est transfigurĂ© en un alphabet vivant dans lequel tout est riche de significations nouvelles et oĂč rĂšgne une sensation vivifiante de joie, d'intĂ©gration et de bien-ĂȘtre. que cela peut parfois donner lieu Ă  des connaissances importantes sur soi-mĂȘme, sa vie, son rĂŽle dans le monde et dans la sociĂ©tĂ©. 

La myopie de la recherche que nous Ă©voquions au dĂ©but de cette intervention, qui prĂ©fĂšre ignorer ces aspects de l'expĂ©rience carnavalesque pour se concentrer sur les simples donnĂ©es philologiques et matĂ©rielles, peut conduire et a en fait conduit dans le passĂ© Ă  plusieurs faux pas. , et pas seulement sur le plan purement acadĂ©mique. Pensons aux cas oĂč les tentatives trĂšs louables de chercheurs et d'universitaires pour restaurer des carnavals historiques disparus depuis plusieurs dĂ©cennies ont donnĂ© des rĂ©sultats trĂšs insatisfaisants : dans le meilleur des cas, des pantomimes avec un grand effet visuel, mais qui ne conservent que peu ou rien. de l'esprit authentique et originaire du carnaval. Trop souvent nĂ©gligĂ©es par les chercheurs, les expĂ©riences directes et parfois extraordinaires de ceux qui vivent le carnaval en constituent le cƓur et la raison d'ĂȘtre : et s'il est vrai que chercher des explications pourrait finalement ĂȘtre vain, il n'est en revanche pas impossible d'ignorer ces aspects si l'on veut rĂ©ellement donner, dans la mesure du possible, une image complĂšte de cette tradition fascinante et si profondĂ©ment enracinĂ© dans le mystĂšre de notre passĂ© lointain ainsi que dans l’essence la plus profonde de ce qui fait de nous des hommes. Ce n'est qu'ainsi que le carnaval pourra continuer Ă  ĂȘtre le pont qui unit les mythes ancestraux du passĂ© Ă  la rĂ©alitĂ© des gĂ©nĂ©rations futures. 

Les générations futures sur le pont qui traverse le Mastallone

Barbano, Enzo: Cendres de confettis, Ă©ditions Valsesia 1983

Centini, Massimo: Basure, Masche et créatures étranges, Coédition 2017

Centini, Massimo: Sur les traces de l'Homme Sauvage, Ă©ditorial MagĂšnes 2018

Gallo Pecca, Luciano: Les masques, le carnaval et les célébrations de l'arrivée du printemps dans le Piémont et la Vallée d'Aoste, Giribaudo 1987

Grimaldi, Piercarlo: Temps gras, temps maigres, Ă©ditions Omega 1996

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